Chercheuse : 
Abu Hatoum, Nayrouz

Établissement : 
Université Concordia

Année de concours : 
2021-2022

Depuis la deuxième Intifada palestinienne en 2000 et depuis la construction israélienne du mur de séparation en 2003 en Cisjordanie, les Palestiniens ont été témoins d’une limitation accrue de leur mobilité à travers les territoires palestiniens occupés : la Cisjordanie, la Bande de Gaza et JérusalemEst. Pourtant, face à la restriction croissante des mouvements, il y a eu une prolifération d’espaces et de mouvements artistiques dont certains choisissent les zones tampons de sécurité comme sites de production artistique, tel Qalandia International. D’autres ont réarticulé leurs expériences de vie sous occupation militaire dans leur propres villes et villages, comme Decolonizing Architecture à Bethléem ou le Centre culturel Khalil Sakakini à Ramallah. Plus encore, alors que l’accès aux espaces palestiniens est souvent limité par les points de contrôle militaires et le régime de permis imposés par Israël, lors du récent confinement lié au COVID-19 décrété par l’Autorité palestinienne, la plupart des galeries d’art, centres culturels ou musées palestiniens ont pu déplacer rapidement leurs expositions et activités sur un monde virtuel, comme par exemple Museum from Home du Musée palestinien.

La virtualisation de ces espaces défie les frontières militaires et permet à quiconque dans le monde d’assister et de participer à des événements en direct se déroulant en Palestine. Ce projet de recherche comportera un travail de terrain de six mois d’interviews et d’enregistrements vidéo afin d’enquêter sur la politique de subversion du paysage militarisé en Palestine telle que rendue visible par les artistes palestiniens. Le projet examinera comment les artistes interagissent avec le paysage après la construction du Mur. Depuis sa construction, les villages et les villes palestiniens ont uni leurs forces pour mener des manifestations non-violentes populaires contre la construction du Mur sur leurs terres. Alors que ces manifestations ont initié et fait avancer la discussion sur les effets sociaux, psychologiques et économiques du Mur sur la vie des Palestiniens, les artistes ont étendu cette discussion au domaine visuel de la représentation. Empiriquement, le projet examinera le rôle des artistes dans la subversion et la résistance à la domination visuelle militaire israélienne sur leur territoire. Il suivra les artistes ainsi que les galeries et les espaces muséaux qui déplacent, à travers la photographie, la performance, le son ou les techniques mixtes, les efforts pour générer des œuvres créatives qui résistent à la militarisation, au déplacement et au confinement. Utilisant les arts plastiques comme point de départ ainsi que comme rubrique d’analyse, cette recherche ethnographique pose la question: Quelles sont les conditions de possibilité pour l’art de devenir un espace de subversion étatique ? Peut-on parler d’une forme émergente d’art visuel en Palestine qui fonctionne comme un registre / un outil de résistance ? Si oui, quelle grammaire de souveraineté cet art génère-t-il ?